Déclaration – Tous les pays doivent prendre les mesures les plus audacieuses pour arrêter la COVID-19
Déclaration à la presse du docteur Hans Henri P. Kluge, directeur régional de l’OMS pour l’Europe
Copenhague (Danemark), le 17 mars 2020
Mesdames et Messieurs, nous tenons ce point de presse depuis UN City, un bâtiment vidé de son personnel qui travaille à distance comme mesure de distanciation sociale en réponse à la COVID-19.
La vie de millions de personnes est en train de changer radicalement dans la Région européenne de l’OMS. Il s’agit tout simplement d’une nouvelle réalité. Le rôle des services de santé publique est bien compris. La valeur des personnels de santé n’a jamais été aussi appréciée.
À l’heure actuelle, 152 pays dans le monde sont touchés par ce nouveau virus, et plus de 7 000 personnes ont perdu la vie. Un tiers des cas signalés dans le monde sont observés dans la Région européenne.
L’Europe est l’épicentre de la première pandémie de COVID-19 et tous les pays, sans exception, doivent prendre les mesures les plus audacieuses pour arrêter ou ralentir la propagation de ce virus. Ces « actions les plus audacieuses » doivent revêtir une dimension communautaire. Penser que « cela ne me concerne pas » n’est guère une option.
La Région, et c’est une bonne nouvelle, est en alerte et sur ses gardes. Des mesures de préparation et de riposte ont été prises à de multiples niveaux dans tous nos États membres. Nous surveillons ces mesures en permanence, et organisons des consultations régulières avec nos homologues des ministères de la Santé afin de collecter et de partager des informations utiles.
L’une des questions les plus fréquemment posées par nos États membres ces jours-ci est la suivante : « les gouvernements en font-ils assez pour arrêter l’épidémie ? » Et la deuxième question est : « les gouvernements en font-ils de trop ? Est-ce justifié ? » Pour répondre à cette question, permettez-moi de préciser quelques points concernant l’ampleur de la riposte menée en Europe.
Tout d’abord, nous faisons actuellement face aux scénarios des « quatre C » de la flambée épidémique :
- aucun cas ;
- premier cas ;
- premier « cluster » (groupe de cas) ;
- premières preuves de transmission communautaire.
La flambée épidémique progresse à un rythme différent selon les pays, en fonction de facteurs démographiques et d’autres facteurs. Certains de nos États membres font face aux scénarios 2 et 3, et beaucoup font face aux scénarios 3 et 4. Si les mesures de base de chaque scénario sont les mêmes, l’accent est mis différemment selon le scénario de transmission dans lequel se trouvent les pays.
Chaque pays doit évaluer sa propre situation et son propre contexte, y compris la propagation du virus, les mesures en place et l’acceptabilité sociale, et adopter les interventions les plus appropriées.
Cependant, tous les pays doivent :
- se préparer et être prêts ;
- détecter, protéger et traiter ;
- réduire la transmission ; et
- innover et apprendre, tout en protégeant les personnes vulnérables.
Il ne faut pas adopter « l’une ou l’autre » solution. Il s’agit d’un ensemble de mesures globales qui peuvent générer les meilleurs résultats.
À chaque stade, le public doit être informé et guidé sur la manière de se protéger et de protéger les autres, de soutenir leur communauté et de maintenir un sentiment de normalité dans des circonstances extraordinaires. Les services de santé doivent disposer des équipements nécessaires pour soigner les personnes gravement atteintes, et pour protéger les agents de santé contre l’exposition.
Nous avons la chance qu’en Europe, de nombreux pays disposent désormais d’un plan d’intervention national prévoyant des mesures multisectorielles efficaces, et d’une forte capacité d’analyse en laboratoire.
L’expérience de la Chine et d’autres pays montre que les tests et la recherche des contacts, combinés à des mesures de distanciation sociale et de mobilisation de la communauté, lorsqu’ils sont mis en place avec rapidité et efficacité, peuvent prévenir les infections et sauver des vies.
Le Bureau régional de l’OMS pour l’Europe délivre une expertise et des conseils techniques, collecte et partage des informations et des innovations avec l’ensemble de ses 53 États membres, et travaille avec eux 24 heures sur 24.
- À ce jour, nous avons dépêché, sur demande, des équipes d’experts pour la préparation des hôpitaux, la coordination, la planification du secteur de la santé, les services de laboratoire, la préparation, et l’intervention rapide dans le cadre d’une quarantaine de missions menées dans les pays de la Région.
- Nous avons une équipe solide sur le terrain en Italie, tant à Rome qu’au bureau de l’OMS à Venise.
- Nous collaborons actuellement avec les partenaires du Réseau mondial d’alerte et d’action en cas d’épidémie et les équipes médicales d’urgence en vue de renforcer les capacités et de répondre ainsi à une demande croissante de soutien sur le terrain.
- L’OMS surveille le risque potentiel d’interruption de l’approvisionnement en médicaments, en se concentrant sur les médicaments essentiels pour les soins de santé primaires et les urgences, notamment les antibiotiques, les analgésiques et les traitements contre le diabète, l’hypertension, le VIH et la tuberculose.
- L’OMS fournit du matériel de laboratoire, des appareils médicaux et des équipements de protection individuelle aux pays qui en ont besoin. Nous sommes conscients de certaines pénuries critiques et, pour y remédier, nous travaillons main dans la main avec des partenaires tels que la Commission européenne, l’OMS au niveau mondial et le secteur privé.
- Nous intensifions notre coopération avec les fabricants, et augmentons la capacité d’analyse des laboratoires.
Je tiens à souligner que la demande et le besoin de notre soutien vont en augmentant. Les ressources sont essentielles pour appuyer nos efforts afin que personne ne soit laissé de côté, ou à l’écart. Chaque membre de la société a un rôle à jouer : ne pas être infecté soi-même, et si on est infecté, protéger les autres, en particulier les personnes âgées et les personnes présentant des affections préexistantes.
Nous vivons une époque sans précédent. Il est important que les pays travaillent ensemble, apprennent les uns des autres, et harmonisent leurs efforts. Le virus peut être vaincu par la solidarité au sein des communautés, des nations et de notre Région, ainsi que par la résilience psychologique de chacun. Je vous remercie.