À l’heure de la COVID-19, l’épreuve de l’hiver pour les familles pauvres

Cet hiver, le défi de santé publique – sans précédent – sera de devoir faire face à la pandémie de COVID-19 et à la saison grippale en même temps. Les mois plus froids sont synonymes de difficultés pour les ménages les moins riches. Ceux-ci ont peine à chauffer correctement leur foyer, ce qui les expose à plus de risques sanitaires. Le 31 octobre, à l’occasion de la Journée mondiale des villes, nous prenons un moment pour apprécier nos villes et nos communautés, surtout celles qui sont le plus vulnérables par temps froid, et nous réfléchissons à ce que l’on peut faire pour limiter les risques qu’elles courent.

Dans la plupart des pays de la Région européenne de l’OMS, les inégalités relatives au maintien de la chaleur du foyer en hiver se sont creusées ces dernières années, tout comme les inégalités concernant la capacité à payer les frais de chauffage. Dans presque tous les pays d’Europe, les ménages les plus pauvres sont 4 à 5 fois plus exposés que les plus riches au froid dans leur foyer. Dans plusieurs pays, plus de 30 % des ménages à faible revenu ne sont pas en mesure de préserver la chaleur de leur foyer. La précarité énergétique qui en résulte est souvent mise en corrélation avec des choix de combustibles polluants et non durables.

De même, le recours à des combustibles solides polluants pour le chauffage domestique et la préparation de repas est inégalement réparti et se rencontre surtout dans les zones rurales et chez les ménages à faible revenu. L’emploi de combustibles solides peut augmenter le risque d’un décès prématuré dû à une exposition de longue durée aux particules libérées par la combustion des matériaux, ou à une intoxication aigüe provoquée par l’exposition à du monoxyde de carbone provenant d’appareils de chauffage mal entretenus, dans un environnement mal ventilé. En 2016, la charge des maladies due à la pollution de l’air intérieur par des activités domestiques telles que le chauffage ou la préparation de repas a été estimée à 55 000 décès prématurés dans la Région européenne de l’OMS.

Les restrictions motivées par la COVID-19 touchent particulièrement les personnes déjà plus vulnérables.

Cette année, en raison de l’actuelle pandémie de COVID-19, le thème d’un chauffage domestique propre, à prix abordable, est particulièrement important. En plus de devoir assurer une scolarisation et un travail à domicile, les ménages doivent anticiper d’éventuelles restrictions de mouvement ou des confinements. Cela induira un allongement du temps passé dans les foyers et augmentera encore l’impact des basses températures dans le domicile, ainsi que l’éventuelle pollution de l’air intérieur, surtout pour les familles à faible revenu.

Cette exposition accrue affectera particulièrement les groupes de population déjà plus vulnérables, tels que les personnes âgées, les enfants ou les personnes déjà malades, s’ils sont confinés à leur domicile, et les ménages dans lesquels un membre de la famille a été prié de se mettre en quarantaine ou en isolement à domicile. La situation pourrait être encore aggravée par la crise économique qui, dans de nombreux pays, a entraîné des pertes d’emplois et du chômage temporaire, ce qui a considérablement augmenté le nombre de personnes frappées par la précarité énergétique et les conséquences de cette dernière.

Enfin, pendant la pandémie de COVID-19, une présence prolongée à l’intérieur, dans un espace insuffisamment ventilé où se tiennent de nombreuses personnes, peut affecter le risque de transmission communautaire, car le virus se propage à partir de la bouche ou du nez d’une personne infectée sous forme de petites particules liquides lorsqu’elle tousse, éternue, parle, chante ou respire profondément.

Ces modes de transmission augmentent encore l’importance d’une bonne ventilation intérieure pendant l’hiver, malgré la tendance à préserver l’isolation de la maison pour la garder au chaud et réduire la consommation d’énergie. C’est d’autant plus essentiel lorsque la famille est nombreuse et entassée sur une superficie restreinte, étant donné que ce manque d’espace et de possibilités de maintenir une distanciation physique accroît le risque de transmission. Le manque d’espace est une source de préoccupation, surtout pour les ménages pauvres ou monoparentaux. Dans certains pays d’Europe de l’Est, par exemple, près de 3 ménages monoparentaux sur 4 disposant d’un revenu modeste sont exposés à un manque d’espace.

Que peut-on faire ?

À un niveau personnel, nous devons continuer à nous laver les mains avec du savon, à respecter les règles d’hygiène en cas de toux, à maintenir une distance de sécurité par rapport aux autres personnes et – lorsque cela n’est pas possible – à porter un masque.  Nous savons que ces mesures sont indispensables pour briser la chaîne de transmission, et - surtout en hiver - restent le moyen le plus efficace de se protéger et de protéger les autres membres du foyer. Une bonne ventilation de l’environnement intérieur permettra de protéger encore mieux les personnes, en particulier à cette époque de l’année.

Dans le cadre d’une collaboration avec les pouvoirs publics nationaux, les villes peuvent jouer un rôle important dans l’atténuation de ces risques en facilitant un approvisionnement énergétique adéquat à un prix abordable pour l’hiver qui approche, et en élaborant des plans d’aide aux personnes qui ne peuvent se permettre de chauffer. Une bonne préparation pour éviter des ruptures locales et nationales de l’approvisionnement en services de chauffage et une défaillance des infrastructures permettrait de limiter encore davantage les risques et l’impact sanitaire entraînés par des pénuries de chauffage. Enfin, les autorités locales peuvent mieux analyser la manière dont se répartissent les problèmes de logement en rapport avec le confort thermique, la consommation d’énergie et le manque de place, autant d’aspects qui ont une incidence sur la santé et le bien-être des ménages défavorisés et peuvent contribuer à accroître le risque de transmission pendant les périodes de confinement.

En planifiant, les particuliers et les autorités peuvent alléger la charge qui, pendant la saison froide, pèse sur les systèmes de santé, d’autant plus que ces derniers sont déjà fortement sollicités par la prise en charge des patients atteints de COVID-19.