Foire aux questions

1. Qu’est-ce que la résistance aux antibiotiques ?

La résistance aux antibiotiques est le processus naturel qui permet aux bactéries de développer au fil du temps une résistance aux médicaments utilisés pour les traiter. Au gré du développement de cette résistance, les médicaments deviennent progressivement moins efficaces, et finissent par perdre entièrement leur pouvoir de guérison. La résistance aux antibiotiques est la conséquence du recours à ces médicaments. Elle est en outre accélérée par leur utilisation abusive.

2. Qu’entend-on par utilisation « inappropriée » des antibiotiques ?

L’utilisation inappropriée (ou imprudente) se produit lorsque les antibiotiques sont administrés quand cela n’est pas nécessaire, ou pendant une trop courte durée, à une posologie insuffisante, avec une activité trop faible, voire pour une maladie ne relevant pas du médicament en question. L’utilisation exagérée et insuffisante des antibiotiques joue également un rôle à cet égard : l’utilisation exagérée se produit notamment lorsque l’on procède à une prescription excessive de ces médicaments, un phénomène généralement observé dans les pays riches ; et l’utilisation insuffisante est due au manque d’accès, à une posologie inadéquate, à la faible observance et à la piètre qualité des médicaments, en particulier dans les pays les plus pauvres. Par exemple, dans certains pays, les antibiotiques peuvent être achetés en doses uniques, sans ordonnance. En cas de difficultés économiques, beaucoup de patients arrêtent le traitement antibiotique dès qu’ils se sentent mieux, le cas échéant avant l’élimination du microbe.

3. La résistance aux antibiotiques est-elle juste le résultat d’un recours abusif à ces substances ?

Si l’utilisation abusive des antibiotiques est certes l’une des causes du problème, la résistance dépend d’un bien plus grand nombre de facteurs. La résistance aux médicaments étant un processus naturel, tous les microorganismes peuvent finir par développer au fil du temps une résistance aux médicaments utilisés pour les traiter. Néanmoins, l’adoption de politiques nationales, l’utilisation rationnelle des médicaments par les prestataires et les patients, et l’usage judicieux des antibiotiques dans la santé et la production animales, combinés à la mise en place de mesures de lutte anti-infectieuse, peuvent largement contribuer au ralentissement du développement et de la propagation de la résistance.

4. Quel est le coût de la résistance aux antibiotiques pour la société ?

Il n’existe aucune donnée au niveau mondial sur le coût de la résistance, et beaucoup de pays n’ont procédé à aucune estimation de ce coût pour leur population. Néanmoins, des bases factuelles à ce sujet sont disponibles dans certaines régions d’Europe et aux États-Unis. Dans l’Union européenne, 25 000 personnes décèdent chaque année des suites d’une infection bactérienne multirésistante, le coût annuel pour les systèmes de soins de santé étant estimé à 1,5 milliard d’euros. Aux États-Unis, les coûts médicaux imputables aux infections pharmacorésistantes sont estimés à plus de 20 milliards de dollars des États-Unis (USD) par an. Celles-ci entraînent aussi 8 millions de journées d’hospitalisation supplémentaires. Le coût total pour la société se chiffre à plus de 35 milliards d’USD par an.

La résistance aux antibiotiques impose un fardeau à la fois médical et financier. Quand l’antibiotique de choix ou de prédilection s’avère inefficace (traitement de première intention), d’autres antibiotiques plus onéreux doivent dès lors être utilisés (traitement de deuxième intention). Selon les estimations, la différence de coût entre les médicaments de première et de deuxième intentions se traduit par une augmentation de 50 à 100 fois supérieure pour les médicaments antituberculeux, et de 2 à 60 fois supérieure pour les antibiotiques.

5. Pourquoi l’OMS investit-elle autant d’efforts dans la lutte contre la résistance aux antibiotiques ?

La résistance aux antibiotiques ne date pas d’hier. Il s’agit en substance d’un phénomène naturel. Cependant, elle devient plus dangereuse avec le développement de plus en plus rapide et à un rythme alarmant des bactéries, ou de leur résistance aux médicaments utilisés pour les traiter. Si l’invention des antibiotiques et d’autres médicaments antimicrobiens a modifié le cours de l’histoire de l’humanité, leur efficacité est en danger. En l’absence de mesures correctrices et de protection d’urgence, le monde va se retrouver dans une ère post-antibiotique : la majorité des infections communes ne pourront plus être soignées et seront de nouveau mortelles.

Par conséquent, l’OMS plaide en faveur de la mise en place d’interventions urgentes et concertées de la part des pouvoirs publics, des professionnels de santé, du secteur privé, de la société civile et des patients afin de freiner l’apparition et la propagation de la résistance aux médicaments, limiter son impact actuel et permettre aux générations à venir de profiter des avancées de la médecine.

6. Que fait l’OMS ?

L’émergence de la résistance aux antimicrobiens est une source de préoccupation croissante, comme en témoignent plusieurs résolutions approuvées par les États membres et à l’origine d’un certain nombre d’initiatives de l’OMS à cet égard. En septembre 2011, l’OMS a lancé la Stratégie mondiale pour la maîtrise de la résistance aux antimicrobiens, qui prévoit un grand nombre d’interventions en vue de ralentir l’émergence et réduire la propagation de la résistance dans divers contextes. Depuis lors, davantage de progrès ont été réalisés grâce aux campagnes, aux consultations d’experts, aux évaluations des risques, aux documents d’orientation et aux efforts de renforcement des capacités des différents programmes de l’OMS œuvrant dans le domaine de la résistance aux antimicrobiens.

L’OMS continue de plaider, auprès des pouvoirs publics, en faveur du contrôle et du suivi de l’usage des antibiotiques, de la mise en œuvre de la surveillance du phénomène de résistance, de l’adoption rigoureuse des stratégies de prévention et de lutte contre les infections et de l’application de la législation permettant d’assurer l’efficacité continue des médicaments antimicrobiens. Dans le cadre de la Journée mondiale de la santé 2011 consacrée à la résistance aux antimicrobiens, l’OMS a largement mis en évidence ce problème à multiples facettes. Elle œuvre actuellement à l’intégration de ces activités en une seule approche globale visant à fournir aux États membres les recommandations et les outils nécessaires pour lutter efficacement contre ce fléau à tous les niveaux d’engagement.

7. Que fait l’OMS dans la Région européenne ?

En septembre 2011, à l’occasion de la session du Comité régional de l’OMS pour l’Europe tenue à Bakou (Azerbaïdjan), 53 pays ont adopté un nouveau Plan d’action stratégique européen sur la résistance aux antibiotiques. Élaboré par le Bureau régional de l’OMS pour l’Europe après plusieurs consultations approfondies avec des experts et des responsables politiques, et s’inspirant des derniers résultats de la recherche, le Plan d’action s’appuie sur l’élan créé par la Journée mondiale de la santé 2011, et de son slogan « Agir aujourd’hui pour pouvoir soigner encore demain ».

Le Plan d’action stratégique européen sur la résistance aux antibiotiques recense sept domaines clés nécessitant la prise de mesures pour garantir la sécurité des Européens, à savoir :

  • renforcer la coordination nationale multisectorielle en vue d’endiguer la résistance aux antibiotiques ;
  • renforcer la surveillance de la résistance aux antibiotiques ;
  • promouvoir des stratégies pour l’utilisation rationnelle des antibiotiques et renforcer la surveillance nationale de leur consommation ;
  • renforcer la lutte anti-infectieuse et la surveillance de la résistance aux antibiotiques dans les services et établissements de soins de santé ;
  • prévenir et lutter contre le développement et la propagation de la résistance aux antibiotiques dans les secteurs vétérinaire et agricole ;
  • promouvoir l’innovation et la recherche sur les nouveaux médicaments et les nouvelles technologies ;
  • améliorer la sensibilisation, la sécurité des patients et les partenariats.

8. Que peuvent faire les pouvoirs publics ?

Les pouvoirs publics peuvent jouer un rôle pilote à cet égard et adopter des politiques globales afin de prévenir l’émergence de la résistance aux antibiotiques et garantir que ces politiques disposent des ressources adéquates.

9. Que peuvent faire les consommateurs ?

Les antibiotiques constituent une ressource précieuse pour l’ensemble de la population mondiale. Il s’agit d’un bien collectif, et nous devons par conséquent préserver cette ressource et l’utiliser avec responsabilité. Les consommateurs peuvent y contribuer en utilisant les antibiotiques uniquement sur ordonnance, et en terminant le cycle complet du traitement. En effet, l’administration partielle du traitement contribue au développement de la résistance aux médicaments. Les consommateurs doivent absolument comprendre que les antibiotiques conçus pour les infections bactériennes n’ont aucun effet sur les infections virales telles que le rhume, la toux ou la grippe.

10. Que peuvent faire les médecins ?

Les médecins peuvent subir la pression des patients et de pratiques de marketing pharmaceutiques inappropriées, et prescrire des médicaments quand ceux-ci ne s’avèrent pas nécessaires. Il importe que tous les professionnels de santé, y compris les médecins, résistent à cette pression. Les médecins peuvent expliquer à leurs patients quand l’administration des antibiotiques et d’autres médicaments antimicrobiens est appropriée ou non. En outre, ils peuvent leur expliquer que le traitement ainsi prescrit doit être pris dans son intégralité. Celui-ci ne doit pas être interrompu dès que les patients commencent à sentir une amélioration de leur état.

11. Que peuvent faire les pharmaciens ?

Les pharmaciens ont un rôle particulièrement important à jouer, parce que dans la plupart des cas, ce sont eux qui fournissent les antibiotiques aux patients. Comme les autres professionnels de santé, les pharmaciens peuvent s’assurer que les patients comprennent l’importance de limiter la consommation de médicaments à ceux qui leur sont prescrits, et de terminer le cycle complet du traitement.

12. Que peuvent faire les vétérinaires, les agriculteurs et les éleveurs ?

Si les animaux malades doivent aussi être soignés, leur traitement doit être rationnel, comme chez les humains. Le recours systématique aux antibiotiques chez un grand nombre d’animaux en bonne santé, notamment comme facteurs de croissance, est susceptible de provoquer l’apparition et la progression de bactéries résistantes, et de causer des infections résistantes chez les animaux comme chez les humains. Les microorganismes résistants présents chez les animaux destinés à l’alimentation peuvent en effet se propager dans les populations humaines par la consommation de denrées contaminées, à la suite d’un contact direct avec des animaux, ou par le biais de l’environnement, par exemple dans l’eau contaminée. Les agriculteurs et les éleveurs peuvent améliorer la gestion sanitaire de la production alimentaire animale en garantissant une bonne hygiène et en respectant les bonnes pratiques d’élevage. Les vétérinaires peuvent faire preuve de prudence lors de la prescription des antibiotiques, notamment ceux qui revêtent une importance primordiale en médecine humaine.

13. Que peut faire l’industrie pharmaceutique ?

La recherche et le développement de nouveaux produits pharmaceutiques, notamment de médicaments et de vaccins, et de nouveaux outils de diagnostic sont essentiels pour protéger les générations futures. L’élaboration de vaccins pour prévenir les maladies bactériennes permettrait de limiter la nécessité de recourir aux antibiotiques. D’autre part, avec le développement du phénomène de résistance, de nouveaux médicaments sont nécessaires, ainsi que de nouvelles façons d’utiliser ceux existants. Actuellement, très peu de nouveaux médicaments antimicrobiens, diagnostics et vaccins sont en cours de recherche et de développement. À titre d’exemple, moins de 5 % des médicaments actuellement en développement sont en fait de nouveaux antibiotiques. Le secteur pharmaceutique doit collaborer avec des partenaires pour surmonter les obstacles à la recherche et au développement, et garantir un accès généralisé aux médicaments, aux vaccins et aux outils de diagnostic. De meilleurs incitants sont aussi nécessaires pour accroître les activités de recherche et de développement dans ce domaine vital.