Déclaration – La santé physique et mentale est essentielle pour la résilience durant la pandémie de COVID-19
Déclaration à la presse du docteur Hans Henri P. Kluge, directeur régional de l’OMS pour l’Europe
Copenhague (Danemark), le 26 mars 2020
La prise de mesures sans précédent afin de ralentir et d’interrompre la transmission de la COVID-19 nous fait certes gagner du temps et réduit la pression sur nos systèmes de santé, mais elle représente un coût social et économique important. La distanciation physique et l’isolement ainsi que la fermeture des écoles et des lieux de travail sont des mesures particulièrement difficiles pour nous, car elles influent sur ce que nous aimons faire, les lieux où nous voulons être, et les personnes avec qui nous voulons être.
Il est absolument naturel que chacun d’entre nous ressente du stress, de l’anxiété, de la peur et de la solitude pendant cette période. À l’OMS, nous considérons que les conséquences de la COVID-19 sur notre santé mentale et notre bien-être psychologique sont très importantes. C’est la raison pour laquelle cette problématique sera au cœur de notre discussion aujourd’hui.
Mais permettez-moi tout d’abord de vous donner un aperçu de la situation actuelle en matière de COVID-19 dans la Région européenne de l’OMS.
Situation épidémiologique de la Région européenne de l’OMS
Depuis notre dernière séance il y a plus d’une semaine, le nombre de cas de COVID-19 et de décès dus à ce virus a triplé dans notre Région. Le taux d’augmentation a été particulièrement marqué dans 4 des 5 pays accusant le plus grand nombre de cas (Espagne, France, Allemagne et Suisse).
La Région européenne de l’OMS a signalé plus de 220 000 cas et 11 987 décès associés à la COVID-19. Cela signifie qu’au niveau mondial, environ 6 cas sur 10 et 7 décès sur 10 sont observés dans notre Région. À l’heure où nous parlons, le nombre de cas dans le monde a dépassé la barre des 400 000.
Selon les données disponibles, nous savons également qu’une infection sur 10 touche les personnels de santé, et que beaucoup d’autres sont en quarantaine, ce qui affecte la capacité d’intervention de nos services de santé. Cela nous préoccupe tout particulièrement. Hier encore, l’Italie faisait état de 6 200 agents de santé infectés. Nous devons tous prendre des mesures afin de protéger ces personnes courageuses du mieux que nous pouvons. Ils ne ménagent aucun effort pour vous protéger et prendre soin de vous. Nous ne pouvons qu’imaginer l’augmentation de leur niveau de stress en ces temps difficiles. Pourtant ils font de grands sacrifices pour le bien de la communauté dans son ensemble.
Bien que la situation reste très grave, nous commençons à voir quelques signes encourageants. L’Italie, qui compte le plus grand nombre de cas dans la Région, vient de connaître un taux d’augmentation légèrement inférieur, bien qu’il soit encore trop tôt pour affirmer que ce pays ait atteint le pic de l’épidémie. Nous serons bientôt en mesure de déterminer l’ampleur de l’impact des mesures prises dans de nombreux pays.
Dans cette situation, nous devons rester optimistes, et en bonne santé physique et mentale, car c’est essentiel pour notre résilience psychologique afin de relever ensemble ce défi.
Le rôle que nous pouvons jouer
Nous faisons tous partie d’une communauté. Il est dans notre nature humaine de prendre soin les uns des autres, car nous recherchons à notre tour le soutien social et émotionnel des autres. Les effets perturbateurs de la COVID-19 constituent pour nous tous une occasion. L’occasion de nous surveiller, de nous appeler et de chatter en vidéo, d’être attentifs et sensibles aux besoins uniques de santé mentale des personnes dont nous nous occupons. Notre anxiété et nos craintes doivent être reconnues et non pas ignorées, mais mieux comprises et prises en compte par les individus, les communautés et les pouvoirs publics.
Il est essentiel que nous relevions les défis de la santé mentale publique au cours des semaines et des mois à venir en Europe et au-delà :
- en diffusant rapidement des informations compréhensibles et fiables des plus jeunes aux plus âgés de notre société ;
- en apportant un soutien psychologique aux travailleurs de première ligne et aux familles endeuillées ;
- en poursuivant les soins et le traitement des personnes souffrant de handicaps cognitifs, mentaux et psychosociaux ;
- en protégeant les droits humains, en particulier de ceux dont les droits sont souvent ignorés ou violés, notamment les réfugiés et les migrants, les détenus, les résidents d’autres établissements fermés tels que les hôpitaux psychiatriques ou les centres de protection sociale, ainsi que les personnes handicapées.
L’OMS et ses partenaires ont préparé un ensemble de supports consacrés à la COVID-19 afin d’informer et de guider les pays et le public eu égard à ces niveaux de soutien psychologique et de santé mentale, notamment des séances d’information et les infographies qui les accompagnent sur la stigmatisation sociale ainsi que sur les besoins de la population générale, des agents de santé, des personnes en soins de longue durée et d’autres. Ce matériel est actuellement traduit et diffusé dans de nombreux pays de la Région. Parmi les autres supports en cours d’élaboration par l’OMS et ses partenaires, il convient de mentionner la production d’un livre d’histoires pour les 4-10 ans et des versions d’outils de l’OMS tels que « Premiers secours psychologiques » et « Gestion des problèmes plus » qui peuvent être diffusés à distance via des plates-formes numériques.
La question que nous nous posons tous est de savoir comment gérer les situations stressantes qui se produisent si rapidement dans nos vies et nos communautés, et comment y faire face. Nous pouvons ici faire appel aux remarquables pouvoirs de force, de résilience et de coopération que nous possédons heureusement en tant qu’êtres humains.
Personnellement, j’essaie de m’en tenir à ce qui a marché pour moi dans le passé lorsque je veux rester calme. Par exemple, l’apprentissage et la pratique de techniques de relaxation simples (comme les exercices de respiration, la relaxation musculaire, la méditation introspective) peuvent tous être très utiles pour soulager la détresse physique et mentale. J’essaie également de reconnaître les pensées qui me dérangent lorsqu’elles se produisent, et d’en discuter avec les personnes qui m’entourent. Il est probable qu’elles en aient aussi, et nous serons peut-être plus à même de trouver des solutions collectives. Essayez de rester positif.
Je me suis rendu compte qu’en tant que mari, père, collègue et dirigeant, c’est maintenant que j’ai le plus besoin de faire preuve d’empathie, de solidarité et d’intelligence émotionnelle, et de joindre le geste à la parole pour ne laisser personne de côté.
En fin de compte, il n’y a qu’une seule solution : agir avec gentillesse, agir avec amour, mais en respectant la distanciation physique.
Merci beaucoup.