L’Europe contre-attaque : le nouveau plan d’action de l’OMS combat la résistance aux antibiotiques
Bakou, 15 septembre 2011
Aujourd’hui, à Bakou (Azerbaïdjan), à l’occasion de la session du Comité régional de l’OMS pour l’Europe, 53 pays discuteront de l’adoption d’un nouveau Plan d’action stratégique européen sur la résistance aux antibiotiques. Élaboré par le Bureau régional de l’OMS pour l’Europe après plusieurs consultations approfondies avec des experts et des responsables politiques, et s’inspirant des derniers résultats de la recherche, le plan d’action s’appuie sur l’élan créé par la Journée mondiale de la santé 2011, et de son slogan « Agir aujourd’hui pour pouvoir soigner encore demain ».
« Nous savons qu’il faut agir maintenant. La résistance aux antibiotiques atteint des niveaux sans précédent, et de nouveaux antibiotiques ne seront pas élaborés assez rapidement », a déclaré Zsuzsanna Jakab, directrice régionale de l’OMS pour l’Europe. « Les antibiotiques sont une découverte inestimable, mais nous les tenons pour acquis, et nous les utilisons de manière excessive et abusive : il existe désormais des superbactéries qui ne réagissent à aucun traitement, et c’est la raison pour laquelle autant de soutien a été apporté au plan d’action. »
Chaque année, dans l’Union européenne, un nombre estimé de plus de 25 000 patients décèdent des suites d’une infection bactérienne résistante aux antibiotiques et souvent d’origine nosocomiale. Et ceci malgré les progrès importants réalisés et les efforts déployés par l’Union européenne, notamment en matière de surveillance et de sensibilisation. Le nombre total de décès pour l’ensemble de la Région européenne, qui comprend 53 pays, reste inconnu car les données à ce sujet ne sont pas toujours disponibles. Or, tout indique que la situation est en fait encore plus grave. Les médecins et les scientifiques de la Région craignent que l’utilisation inconsidérée des antibiotiques, à l’origine de l’émergence et de la propagation des infections résistantes à ces médicaments, nous fasse revenir à l’ère pré-antibiotique, quand de simples infections ne réagissaient pas au traitement, et quand les opérations et les interventions de routine engageaient le pronostic vital.
Le plan d’action
Le plan d’action met en évidence les risques réels et urgents découlant de la perte d’efficacité des antibiotiques indispensables et salvateurs, et insiste sur la nécessité de réduire la complaisance ainsi que l’utilisation excessive et abusive de ces médicaments. Il est par conséquent demandé à tout le monde, du grand public aux médecins, en passant par les hommes politiques, les sociétés pharmaceutiques et les vétérinaires, d’utiliser les antibiotiques correctement et de façon responsable.
Le Plan d’action stratégique européen sur la résistance aux antibiotiques recense sept domaines clés nécessitant la prise de mesures pour garantir la sécurité des Européens, à savoir :
- la coordination multisectorielle nationale sur l’endiguement de la résistance aux antibiotiques ;
- la surveillance de la résistance aux antibiotiques et de leur consommation ;
- les stratégies nationales pour l’utilisation rationnelle des antibiotiques et le renforcement de la surveillance nationale de la consommation d’antibiotiques ;
- la lutte anti-infectieuse dans les hôpitaux et les cliniques ;
- le développement et la propagation de la résistance aux antibiotiques dans les secteurs vétérinaire et agricole ;
- l’innovation et la recherche sur les nouveaux médicaments et les nouvelles technologies ;
- la sensibilisation, la sécurité des patients et les partenariats.
La coordination et la collaboration entre les pays doivent être améliorées
Si plusieurs pays européens ont montré comment lutter contre la résistance aux antibiotiques, dans de nombreux pays, il n’existe aucune réglementation nationale sur l’utilisation de ces médicaments. Les antibiotiques sont administrés aux animaux en bonne santé comme facteurs de croissance ou pour prévenir les maladies, et certaines sociétés commerciales s’engagent dans une promotion irresponsable. Dans un trop grand nombre de pays, la population peut se procurer des antibiotiques en vente libre, sans ordonnance (y compris les agriculteurs), et les utiliser à volonté. En outre, les médecins les prescrivent souvent trop facilement ou à mauvais escient, et les patients les utilisent pour traiter des infections virales comme la grippe et le rhume, car beaucoup croient (à tort) que ces maladies peuvent être traitées avec des antibiotiques.
Une enquête informelle réalisée dans 21 pays de la partie orientale de la Région européenne indique que, dans 14 d’entre eux, l’achat d’antibiotiques sans ordonnance est pratique courante. Sur ces 21 pays, seuls 7 disposent d’un plan d’action national sur la résistance aux antibiotiques, et 7 pays sur 21 ont mis en place un comité national de coordination. Moins de la moitié des pays repris dans l’étude possèdent des directives nationales sur l’hygiène des mains dans les services et établissements de soins de santé, et seulement un tiers d’entre eux disposent d’un système national de surveillance et d’une base de données sur la résistance aux antibiotiques.
Les campagnes de sensibilisation, comme la Journée européenne d’information sur les antibiotiques, organisée en novembre de chaque année par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies, ont permis de résoudre le problème de l’utilisation exagérée des antibiotiques. Plusieurs pays accusent une diminution constante de la consommation de ces médicaments et, par conséquent, une baisse du phénomène de résistance. La mise en place de programmes rigoureux de prévention et de lutte contre les infections dans les services et les établissements de soins de santé, à commencer par une hygiène simple des mains, permet de réduire de manière significative l’apparition, par exemple, de Staphylococcus aureus résistant à la méticilline, une bactérie redoutable survenant en milieu hospitalier.
Nouveaux antibiotiques
Le besoin en nouveaux antibiotiques se fait de plus en plus sentir alors que la résistance se répand dans les pays d’Europe. Celle-ci rend d’ailleurs les infections telles que celles de la circulation sanguine très difficiles à traiter. Par exemple, un nombre croissant de bactéries sont porteuses d’un gène qui leur permet de produire une enzyme appelée New Delhi métallo-ß-lactamase-1 (NDM-1) qui les rend résistantes à une large gamme d’antibiotiques, dont les carbapénèmes, les antibiotiques de dernier recours contre de nombreuses infections bactériennes graves. Un nombre limité de nouveaux antibiotiques est actuellement en cours de développement afin de lutter contre les bactéries résistantes, et la propagation de graves gènes de résistance au niveau mondial est jugée cauchemardesque. En outre, la tuberculose multirésistante, particulièrement importante dans la partie orientale de la Région, continue de se propager et menace la vie d’un grand nombre de populations.
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Conseiller principal, Résistance aux antimicrobiens
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Viv Taylor Gee
Conseillère en communication
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