Le traitement des infections résistantes aux antibiotiques chez les enfants d’Ouzbékistan

Le docteur Nigora Tadjieva travaille pour l’Institut de recherche sur l’épidémiologie, la microbiologie et les maladies infectieuses de Tachkent, en Ouzbékistan. Elle a 20 années d’expérience, les cinq dernières comme cheffe du département des infections intestinales aiguës chez les enfants de moins d’un an. Elle traite annuellement environ quatre infections résistantes aux antibiotiques, en particulier celles causées par Salmonella et, moins fréquemment, par Shigella.

Quelle a été votre expérience lors du traitement de patients souffrant d’infections résistantes aux antibiotiques ? Quelle est la différence entre ce traitement et celui administré aux patients qui réagissent normalement aux antibiotiques ?

Si la maladie est due à une souche résistante de Salmonella, son évolution sera particulièrement préoccupante. Les antibiotiques administrés de manière empirique n’ont aucun effet, ou n’apporte aucune forme d’amélioration. Alors, nous devons avoir recours aux antibiotiques de réserve, une procédure qui rallonge la durée du traitement. Il faut traiter deux fois plus, ce qui engendre également des coûts et une plus grande utilisation des ressources. Pour les enfants et leurs parents, la prolongation du traitement et de la période d’attente des tests de laboratoire a un effet négatif par rapport aux cas normaux.

Comment les parents réagissent-ils généralement quand vous leur dites que vous ne pouvez pas prescrire des antibiotiques, et qu’il faut attendre le résultat des tests de laboratoire afin de confirmer les pathogènes responsables de la maladie ?

Très souvent, les parents veulent que l’on prescrive des antibiotiques avant de recevoir la confirmation du laboratoire. Ils ont vraiment hâte de commencer le traitement. Nous essayons d’expliquer aux parents les dangers d’une prescription et d’une administration inappropriées de ces médicaments. En outre, ceux-ci peuvent avoir des répercussions sur d’autres organismes dans le corps. Il est préférable d’utiliser des antibiotiques qui ont un impact direct sur l’agent pathogène. J’explique aussi que, comme nous avons à faire à de très jeunes enfants, ces médicaments peuvent entraîner de lourds effets. En fin de compte, les parents acceptent généralement mes recommandations, car ils veulent que leur enfant se rétablisse rapidement.

Vous arrive-t-il de devoir informer vos collègues, les autres professionnels de santé, des dangers que présente la résistance aux antibiotiques ?

Parfois, je dois informer mes collègues, et tous ne sont pas réceptifs. Certains peuvent se montrer réticents, et nous leur fournissons alors des lignes directrices sur la manière de prescrire et d’administrer les antibiotiques correctement. Nous essayons de les convaincre de suivre ces recommandations.

Quels conseils donneriez-vous aux autres travailleurs de la santé afin d’aider à stopper la résistance aux antibiotiques ?

MMon conseil est de ne pas se précipiter en prescrivant des antibiotiques. J’aimerais que l’on sensibilise davantage à ce problème et que l’on organise des activités de formation, auprès du grand public par l’intermédiaire des mass médias, et aussi auprès des travailleurs de la santé, afin qu’ils sachent exactement comment utiliser les antibiotiques.