Un rapport de l’OMS révèle qu’en Europe, trop d’hommes meurent jeunes de causes évitables
Copenhague, Rome, 17 septembre 2018
Le tout premier rapport de l’OMS sur la santé et le bien-être de l’homme dans les 53 pays de la Région européenne de l’OMS révèle que les hommes n’ont jamais vécu en meilleure santé et plus longtemps qu’aujourd’hui. Mais malgré les progrès réalisés, beaucoup d’entre eux meurent beaucoup trop jeunes de causes évitables, et les raisons qui expliquent ce phénomène dépassent le champ de la biologie.
Ces nouvelles constatations suscitent des appels en faveur de l’adoption d’une approche sexospécifique pour que la santé des hommes figure parmi les priorités des décideurs de la santé dans la Région européenne. Le rapport intitulé « The health and well-being of men in the WHO European Region: better health through a gender approach » [La santé et le bien-être de l’homme dans la Région européenne de l’OMS : améliorer la santé en adoptant une approche sexospécifique] sera officiellement présenté aux délégués lors de la session de l’organe décisionnel de l’OMS pour la Région européenne, qui s’ouvre aujourd’hui à Rome. Les 53 États membres devraient adopter une nouvelle stratégie régionale pour remédier aux problèmes rencontrés en matière de santé de l’homme.
« La Région européenne montre l’exemple en faisant chuter la mortalité prématurée due aux maladies non transmissibles. Cependant, trop d’hommes restent en dehors du champ d’activité des services de santé et meurent jeunes de ces maladies, ou de traumatismes. Ce nouveau rapport nous aide à comprendre leurs besoins spécifiques et à voir comment nous pouvons proposer aux hommes des interventions tenant compte des sexospécificités, qui nous aideront également à atteindre l’objectif de développement durable relatif à l’égalité des sexes », déclare le docteur Zsuzsanna Jakab, directrice régionale de l’OMS pour l’Europe.
Des différences alarmantes – mais évitables – en matière de mortalité masculine dans la Région
Ce rapport met en évidence l’écart considérable qui existe entre les hommes de la Région en matière de santé. En effet, l’espérance de vie moyenne des hommes à la naissance varie de 64 à 81 ans, soit une différence de 17 ans entre les pays. En particulier, le rapport révèle que :
- chez l’homme, environ 86 % des décès sont imputables à une maladie non transmissible et à des traumatismes qui affectent les hommes à un plus jeune âge.
- dans la partie orientale de la Région, 37 % des décès liés aux maladies non transmissibles surviennent avant l’âge de 60 ans, contre 13 % seulement en Europe occidentale.
- les principales causes de décès chez les hommes âgés de 30 à 59 ans sont les maladies cardiovasculaires, les cancers, le diabète et les maladies respiratoires.
- dans certains pays de la partie orientale de la Région, les hommes courent sept fois plus de risques de mourir prématurément d’une maladie cardiovasculaire que dans la partie occidentale.
- les trois quarts environ des hommes décédés dans un accident de la route avaient moins de 25 ans.
Qu’est-ce qui peut expliquer le comportement des hommes lorsqu’ils prennent des risques ou cherchent à être en bonne santé ?
Il y a si longtemps qu’on observe chez l’homme une exposition plus forte à des facteurs de risque que celle-ci est presque considérée comme liée à leur condition biologique, mais les différences entre les hommes de la Région montrent que ce n’est pas le cas. Les normes sexospécifiques et les attentes de la société ont une influence sur les niveaux de tabagisme, de consommation d’alcool et de traumatismes chez les hommes, qui sont plus élevés que chez les femmes, ainsi que sur leur participation plus fréquente à de la violence interpersonnelle. Leur santé se détériore également en raison d’une alimentation peu saine. Ici aussi, on enregistre des différences d’un pays à l’autre de la Région. Par exemple, le risque d’une consommation élevée de sodium est plus élevé en Asie centrale, alors que le principal risque en Europe occidentale est une alimentation pauvre en fruits et légumes frais. Les statistiques les plus récentes montrent :
- qu’en 2016, le tabagisme a été responsable de 1 million de décès d’hommes dans la Région européenne, et qu’il constitue le premier facteur de risque pour la santé des hommes d’Europe occidentale et centrale.
- que la consommation d’alcool et de drogues est le premier facteur de risque en Europe de l’Est, responsable de 24 % des années perdues par les hommes.
- qu’en Asie centrale, le principal facteur de risque pour la santé est une mauvaise alimentation, à laquelle on peut attribuer 17 % des années perdues par les hommes.
De plus, les hommes sont souvent moins enclins que les femmes à consulter un médecin généraliste. Par exemple, il n’est pas rare que de graves problèmes émotionnels ou des symptômes de dépression ne soient pas diagnostiqués chez les hommes parce que ceux-ci ne prennent pas ces problèmes médicaux au sérieux et ne sont pas aussi habitués à demander de l’aide. La non-détection des problèmes de santé mentale contribue à l’augmentation des taux de suicide, qui sont cinq fois plus élevés chez les hommes de 30 à 49 ans que chez les femmes du même âge.
L’égalité des sexes, un avantage pour la santé de l’homme
Ce rapport révèle que le niveau d’aisance matérielle, l’éducation, l’emploi, l’exclusion sociale et la discrimination, les conditions de la retraite et le cadre et les conditions de vie sont parmi les facteurs clés qui influencent la santé et le bien-être de l’homme. Vivre dans un pays où règne l’égalité des sexes est bénéfique pour la santé des hommes et se traduit par des taux de mortalité plus bas, un bien-être plus important, un risque de dépression diminué de moitié, une probabilité accrue d’avoir des rapports sexuels protégés, des taux de suicide moins élevés et 40 % de risques en moins de mourir de mort violente.
Le rapport souligne que l’amélioration de la santé et du bien-être de l’homme est mieux prise en compte lorsqu’il y a une égalité entre les sexes. Pour atteindre les objectifs mondiaux en matière d’égalité des sexes et concrétiser plus rapidement les objectifs fixés en matière de santé, il est essentiel d’inciter les hommes à dispenser des soins rémunérés ou non, à prévenir la violence à l’égard des femmes et à assumer leur part de responsabilités en matière de santé reproductive, tout en facilitant cette participation des hommes.
L’action de santé publique
Les responsables des politiques de santé participant à la session du Comité régional de l’OMS pour l’Europe à Rome seront invités à débattre de la nouvelle Stratégie pour la santé et le bien-être de l’homme dans la Région européenne de l’OMS, qui a été élaborée en consultation avec les pays, des experts, des organisations partenaires et la société civile.
Cette Stratégie propose de nombreuses mesures qui peuvent aider les pouvoirs publics à s’attaquer aux déséquilibres entre les sexes, à intensifier les efforts consentis pour prévenir la violence, à encourager la participation des hommes à la santé reproductive, etc. Elle vise à rendre les systèmes de santé sensibles à la dimension homme-femme et à garantir une meilleure accessibilité des garçons et des hommes aux services de soins. L’objectif est également de comprendre les besoins des hommes en matière de santé, d’établir le contact avec eux et d’assurer une meilleure promotion de la santé auprès d’eux.